Le Sénégal vient d’entrer dans une nouvelle ère économique majeure avec le lancement officiel de ses premières exportations de pétrole, marquant un tournant historique pour le pays. Cette étape cruciale, issue du projet offshore Sangomar, a directement stimulé une croissance trimestrielle record du produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre 2024, avec une hausse de 8,9 % par rapport au trimestre précédent et de 11,5 % en glissement annuel. Cette performance exceptionnelle illustre la capacité du Sénégal à transformer ses ressources naturelles en moteur de développement économique durable.
Un projet pétrolier stratégique et ambitieux
Le champ pétrolier de Sangomar, situé à environ 100 kilomètres au large des côtes sénégalaises, est exploité par le groupe australien Woodside Energy depuis juin 2024. Ce projet, qui a nécessité un investissement de près de 5 milliards de dollars, vise une production stable de l’ordre de 100 000 barils par jour, avec une prévision annuelle de plus de 30 millions de barils pour 2025. Cette production est destinée à la fois à la consommation domestique et à l’exportation, positionnant le Sénégal comme un nouvel acteur énergétique régional.
La première cargaison de pétrole brut sénégalais a été expédiée vers l’Europe, notamment vers les raffineries de Rotterdam et de Trieste, où le pétrole sera raffiné et intégré dans les circuits commerciaux internationaux. Cette exportation marque non seulement une étape symbolique mais aussi un levier concret pour accroître les recettes en devises et renforcer la balance commerciale du pays.
Impact direct sur la croissance économique
L’Agence nationale des statistiques et de la démographie du Sénégal a confirmé que la croissance du PIB au troisième trimestre 2024 a atteint un niveau inédit, largement soutenue par les revenus issus de la production et de l’exportation pétrolière. Le Fonds monétaire international (FMI) anticipe une croissance économique de 9,3 % pour l’ensemble de l’année 2025, portée par l’expansion des secteurs pétrolier et gazier.
Cette dynamique s’inscrit dans un contexte plus large de diversification économique, où le pétrole vient compléter les secteurs traditionnels comme l’agriculture, la pêche et les services. Le développement du raffinage local, avec la Société africaine de raffinage (SAR) qui a commencé à traiter le pétrole brut sénégalais, contribue également à créer de la valeur ajoutée et à réduire la dépendance aux importations de produits raffinés.
Vers l’autonomie énergétique et une transformation structurelle
L’exploitation du pétrole de Sangomar s’accompagne d’une volonté affichée de souveraineté énergétique. Le raffinage local, initié début 2025 à Dakar, permet de produire des carburants essentiels tels que le gasoil, le kérosène, l’essence et le gaz butane à partir du brut national. Cette avancée technique est une étape clé pour réduire les coûts énergétiques, améliorer la sécurité d’approvisionnement et stimuler l’industrie locale.
Par ailleurs, le Sénégal prépare le démarrage du projet gazier Greater Tortue Ahmeyim (GTA), développé conjointement avec la Mauritanie, qui devrait renforcer encore davantage la position du pays sur le marché mondial de l’énergie. Cette double dynamique pétrole-gaz ouvre la voie à une transformation structurelle de l’économie sénégalaise, avec des retombées positives sur l’emploi, les infrastructures et la compétitivité globale.
Enjeux et défis pour un développement durable
Si les perspectives économiques sont prometteuses, la gestion des ressources pétrolières pose également des défis importants. Le Sénégal doit veiller à éviter les écueils classiques liés à la « malédiction des ressources », en assurant une gouvernance transparente, une répartition équitable des revenus et un investissement judicieux dans les secteurs sociaux et productifs.
La montée en puissance du secteur pétrolier devra s’accompagner d’une stratégie claire pour favoriser l’inclusion sociale, la formation professionnelle et le développement des compétences locales. Le pays devra également intégrer les considérations environnementales dans ses politiques énergétiques pour garantir un développement durable et résilient face aux enjeux climatiques.
Un nouveau chapitre pour l’économie sénégalaise
La première exportation de pétrole du Sénégal est bien plus qu’un simple jalon industriel : elle symbolise l’entrée du pays dans une nouvelle phase de croissance économique accélérée et d’intégration dans les marchés énergétiques mondiaux. Avec une croissance trimestrielle record et des projets ambitieux en cours, le Sénégal se positionne désormais comme un acteur clé de la région, capable de tirer parti de ses ressources naturelles pour bâtir un avenir prospère.
Le défi sera de conjuguer cette richesse nouvelle avec une gouvernance responsable et une vision à long terme, afin que les bénéfices du pétrole profitent à l’ensemble de la population et contribuent à un développement inclusif et durable. Le Sénégal, en franchissant ce cap, ouvre la voie à une transformation économique majeure, porteuse d’espoir et d’opportunités pour les années à venir.
